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time is running out — peter+demelza

Peter Gray
Peter Gray

Onglet 1
Âge : 24 ans
Occupation : Vendeur au Souafle écarlate le jour, petite frappe des combats sorciers souterrains la nuit.
Head : time is running out — peter+demelza Rhx0
Habitation : 35 Camden Lock, Londres
Messages : 9
Date d'inscription : 05/04/2024
Onglet 2

   


time is running out — peter+demelza Xsyh

time is running out
ft. demelza rowle
1949 / londres

TW langage grossier, piqûre, sang  

Sous sa peau, le sang devient encre. Peu à peu, le rouge se retrouve noyé par un nuage de cendres. L’hémoglobine n’est plus qu’un pétrole épais qui s’insinue et rampe insidieusement dans chaque ramification veineuse de ses bras. L’obscurité court jusqu’à ses épaules, comme affamée d’atrophier la vie qui pulse dans chaque muscle, chaque cellule qui compose son entité. Insatiable, elle s’avance ensuite vers la base de son cou dans l’objectif pernicieux d’obstruer sa trachée. Et alors, Peter commence à étouffer. Instinctivement, ses doigts désormais de jais viennent gratter l’épiderme pour tenter d’endiguer la propagation des ténèbres, pour retrouver l’oxygène qui commence à lui manquer. Mais le Gryffondor a beau s’échiner, le mal qui l’étreint semble impossible à entraver. Il dissémine par-ci et là son poison infect, lui provoque des douleurs imaginaires et submerge son esprit de visions cauchemardesques. Un vent de panique saisit violemment Peter alors que sous ses yeux écarquillés, la nuée continue son avancée vers le cœur. Son corps tente de lutter pour l’empêcher d’atteindre le dernier refuge de son humanité. Et le blond n’hésite pas à se faire mal dans une tentative désespérée d’arrêter l’inévitable. Seulement, l’effort est vain. Et le myocarde finit par s’infecter, pour ne devenir qu’un vulgaire organe carbonisé.

Peter se réveille en sursaut.

Dans la pénombre de sa chambre, les battements de son palpitant lui paraissent assourdissants. Il sent une sueur froide couler le long de son dos, à la manière d’un couteau de glace lacérant lentement sa moelle épinière. Il lui faut quelques minutes pour reprendre conscience de l’environnement qui l’entoure. Ses yeux encore hagards passent de son lit à moitié défait, jusqu’à ses fringues qui traînent par terre dans un coin. Ils se posent également sur cette maudite plante, en train de crever, que Monroe lui a donnée, posée en équilibre précaire sur une pile de magazines. Un bref soulagement le saisit lorsqu’il comprend enfin qu’il est en sécurité et que ses mains n’ont plus la couleur de l’obscurité. Il se laisse retomber mollement contre ses oreillers, tandis que ses doigts encore un peu fébriles viennent essuyer son front moite. Peter souffle, car ce n’est pas la première fois qu’il se réveille d’une manière aussi brutale. À vrai dire, cela est de plus en plus fréquent depuis cette fameuse journée du dix-neuf novembre 1948. Le jour de l’embuscade des Sceptiques sur le quartier général des Humanistes. Il se souvient nettement de la pagaille, du chaos dément de la bataille. Il revoit ses amis blessés, leurs cris agonisants et l’odeur du sang et de la poussière saturant l’air. Et puis, il y avait eu ce fameux sortilège, qui l’avait immobilisé pendant de longues et douloureuses minutes, en abreuvant son esprit d’hallucinations terrifiantes. Une fois l’enchantement levé, Peter pensait que le mal était derrière lui, que c’en était fini. Mais depuis, des visions sinistres continuent de le hanter. Comme si des résidus de la magie noire utilisée ne s’étaient pas complètement évaporés. Parfois, elles se manifestent en pleine nuit ou au courant de la journée. Elles le paralysent d’une peur panique et le perclus de douleurs lancinantes. Au début, Peter ne s’est pas inquiété outre mesure, mettant cela sur le compte d’un quelconque choc post-traumatique. Cependant, le temps a passé et les effets du sortilège ont persisté. Et à force, son énergie s’en trouve amenuisée. En démontre, les cernes qui logent sous ses orbes bleutés, synonyme flagrant de ses nuits écourtées. Le Sceptique a pourtant été examiné par l’un de ses pairs après les combats. Il est même passé sous l'œil perçant d’Iris Grimshaw, psychomage de son état. Mais, évidemment, lorsqu’on lui a demandé s’il allait bien, il a tout nié en bloc.

J’me porte comme un charme, qu’il avait osé proférer, avec un sourire bien trop blanc pour être vrai.

Juste pour ne pas être mis sur la touche. Pour continuer de s’investir corps et âme dans la cause de Freyr. Mais combien de temps cela peut-il encore durer ? Combien de temps lui reste-t-il avant que sa raison ne finisse par imploser ? C’est ce que semble lui dire les yeux jaunes en amande de Thémis, alors qu’elle saute sur son matelas. Machinalement, la main de Peter vient trouver la tête du félin pour la gratter derrière les oreilles. Un ronronnement réconfortant finit par se faire entendre, tirant une légère esquisse à son propriétaire.

Au-dehors, l’agitation matinale de Camden lui parvient et le décide, non sans ronchonner, à traîner sa carcasse hors de son lit.

***

C’est Simon qui lui en avait parlé. Juste une fois. Au détour d’une conversation qu’ils avaient eu dans une planque des Sceptiques. Bizarrement, Peter s’en était souvenu. Non pas qu’habituellement, il ne retient que la moitié des choses que lui raconte son ami. Enfin, peut-être bien que si. Mais sans doute aurait-il pu oublier cette information-là. Parce qu’une once de regret commence à le saisir alors qu’il se retrouve allongé sur la table d'auscultation de Quinton Fletcher. Au-dessus de sa tête, le plafond de la pièce exiguë est rongé par l’humidité, créant des béances sombres d’où pourrait sortir des bestioles peu reluisantes. Une drôle d’odeur plane également dans l’air, mélange d’une acidité piquante et de pourriture dont Peter ne veut surtout pas connaître l’origine. L’endroit n’est pas particulièrement bien entretenu, à l’image de son médecin déchu. Mais à quoi pouvait-il bien s’attendre de la part d’un médicomage illégal de l’allée des Embrumes ?
Après lui avoir vaguement expliqué ses symptômes, Fletcher a disparu dans une pièce adjacente d’où il entend désormais des objets métalliques qui s’entrechoquent de manière inquiétante. Peter commence à croire qu’il va ressortir avec une jambe en moins, ou qu’il risque de se chopper une maladie qu’on a plus revu depuis le Moyen- Age. Il marmonne un juron tout en essayant de prendre sur lui. Lui, avoir peur ? Jamais. L’instant d’après, Quinton revient à son chevet, et dépose plusieurs instruments sur un chariot alors qu’il s’assoit sur le tabouret roulant près de la table.

— Alors, dit-il en se penchant vers Peter tout en frottant ses mains crasseuses, commençons !

Et le sourire qu’il lui offre n’est définitivement pas rassurant.

— J’vous préviens, menace le blond. Je repars d’ici en entier, je ne vous laisse pas un bras ou un morceau d’estomac.
— C’est ce qu’on va voir, lui répond le médecin en haussant les épaules. Maintenant, arrêtez de bouger, je vais vous ausculter.

Peter serre les dents, les yeux rivés sur les tâches brunes du plafond. Il s’attend presque à vivre un véritable supplice, tant les compétences du praticien lui paraissent suspectes. Seulement, après quelques minutes, où rien ne semble se passer, il ose un petit coup d'œil vers le sorcier à ses côtés. Il voit alors la baguette de ce dernier qui survole sa silhouette et y dépose un voile brumeux. Parfaitement indolore.

— Alors ?
— Hum.
— Qu’est-ce que vous êtes en train de me faire ?
— Hum.
— Est-ce que c’est supposé purger le maléfice ? Parce que je ne sens rien et…
— Taisez-vous. Où c’est peut-être bien votre langue que je vais finir par garder, grommelle Quinton en reposant sa baguette.

Pensif, il se gratte le menton en marmonnant, visiblement en train de réfléchir. Il prend ensuite une seringue, qu’il plante sans prévenir dans le bras de Peter. Surprit par ce subit accès de douleur, le blond fait un sursaut d’anthologie et manque de tomber de la table d’auscultation.

— Argh, arrêtez de vous tortiller comme un Farfadet ou je vous endors pour avoir la paix.
— Vous pourriez prévenir avant de m’enfoncer une aiguille aussi longue que ma…
— Là, c’est terminé, le coupe le médicomage en tapotant sa peau endolorie, avec une expression moqueuse.

À la lumière d’une lampe à huile vacillante, il transfère le sang récolté dans un flacon, pour mieux l’observer. Alors que Peter se redresse en position assise, le sorcier administre une série de sortilèges à l’hémoglobine tout en continuant de baragouiner des choses incompréhensibles. Au bout de quelques minutes de ce manège agaçant, le sorcier fourre la fiole dans les mains du blond, un air circonspect froissant ses traits.

— Je ne peux rien faire. Ça fera 10 gallions et 3 mornilles, gamin.
— Vous n’avez rien fait !
— Il n’y a rien à faire, j’vous dis. Seule la personne qui vous a jeté le sortilège peut le lever complètement. C’est une magie très complexe, celui qui vous a lancé cela ne devait pas beaucoup vous apprécier.

Le dernier commentaire est prononcé avec une once de sarcasme, l’esquisse d’un semi-sourire révélant la dentition jaunâtre de son propriétaire. Comme si quelque part, il comprenait que Peter puisse être victime d’un tel enchantement. Et qu’il l’avait probablement cherché. Du moins, c’est ce que le blond interprète tandis que ses sourcils se froncent de mécontentement.

— J’vous paie que si je ressors d’ici avec une solution à mon problème. Et j’vous garantis que je suis sacrément tenace, qu’il lui répond avec mordant, bien décidé à ne pas bouger.

Quiton Fletcher l’observe un instant. Peut-être hésite-t-il à l’assommer pour qu’il se taise définitivement. Néanmoins, il finit par souffler tout en se dirigeant vers son armoire à pharmacie. Il revient l’instant d’après avec une seconde fiole poussiéreuse, pleine d’un liquide boueux.

— On peut éventuellement essayer une décoction d’ail des trolls avec du dard de scorpion séché du Sahara, cela vous aidera sans doute à trouver le sommeil. Mais vous allez avoir une haleine à faire pleurer une goule, pendant au moins deux semaines.  
— C’est le mieux que vous pouvez faire ?
— Je n’ai pas encore le pouvoir d’effacer le passé, donc oui, c’est tout ce que j’peux faire. Maintenant : oust. J’ai des clients qui attendent.

***

La décoction de Fletcher sent le rat crevé qu’on aurait essayé de cuisiner. Après avoir fait sauter le bouchon de la fiole, l’odeur infâme a soulevé le cœur de Peter et son instinct de Gryffondor courageux s’est mystérieusement fait la malle. Sans même hésiter, il a jeté la mixture, bien décidé à ne pas y goûter. Et il soupçonne fortement le médicomage de s’être foutu de sa gueule. Bougre de gobelin mal peigné. Non seulement, cette visite ne lui a pas réglé son souci, mais en plus, il en est ressorti délesté de plusieurs gallions mal dépensés. Autant vous dire que son humeur n’est pas au beau fixe et que son indice météorologique est plutôt à l’orage. Même Thémis, qui habituellement vient toujours l’apaiser, préfère le laisser. Mais sans doute est-ce à cause de l’odeur fétide de l’ail des trolls qui plane désormais dans sa chambre. Dans un mouvement agacé, Peter ouvre sa petite fenêtre pour ventiler la pièce puis il se laisse tomber sur les draps défaits de son lit en soufflant. Monroe allait encore se demander ce qu’il avait fabriqué.

Après quelques minutes de contemplation vide, il sort de sa poche le second flacon que Quinton lui a confié. À la lumière du jour, il coince le récipient entre son pouce et son index puis, il observe son propre sang. En se concentrant suffisamment, il finit par distinguer de fines volutes noires qui strient le vermeil. Infimes, certes, mais bel est bien présentes. Il se souvient alors des mots du médicomage : seule la personne qui lui a jeté le sortilège peut l’annuler complètement. Cependant, dans le cataclysme de la bataille, Peter n’a pas vu qui était le ou la responsable. Plusieurs mois s’étaient écoulés et les potentiels témoins avaient probablement oublié. Retrouver l’Humaniste en question allait donc lui prendre du temps qu’il n’avait pas forcément. Seulement, après un instant de réflexion, une phrase prononcée par ce satané Fletcher refait surface dans sa mémoire. Une phrase qui lui donne une (mauvaise) idée.

Je n’ai pas encore le pouvoir d’effacer le passé.

***

Quelques jours plus tard, Ministère de la Magie, Londres
Les flammes vertes s’évanouissent sous ses pieds alors qu’il s’empresse de sortir de l’âtre de la cheminée. Pour la forme, il époussette les quelques cendres déposées sur le costume qu’il a enfilé tandis que la semelle de ses chaussures impeccablement cirées résonne contre le parquet. Mais, qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de Peter Gray ? L’ancien Gryffondor est méconnaissable ainsi accoutré. C’est que, l’on a pas l’habitude de le voir aussi tiré à quatre épingles, aussi bien endimanché. Sans son éternel air de fouteur de merde collé sur le visage, l’on peinerait à le reconnaître. Avec une assurance à peine feinte, il se dirige vers les ascenseurs du ministère de la magie. Rares sont les occasions où il avait pu y mettre les pieds, c’est qu’il n’a jamais eu rien à faire parmi tous ces gratte-papiers. Et puis, faut dire qu’il a toujours eu en horreur les bureaux, ces espaces confinés où tout doit être ordonné, où il faut rester assis bien sagement, derrière une montagne de dossiers à traiter. Il préférerait encore prendre un bain de minuit avec le calmar géant du lac de Poudlard, plutôt que d’y passer sa journée.
Sa silhouette nonchalante s'introduit dans l’un des ascenseurs, l’air de rien. Il se fond parmi les employés et les autres visiteurs en jouant les gentleman de la bourgeoisie anglaise, il s’octroie même un masque hautain. Assurément, il remporterait un Oscar haut la main.
Pour Peter, l’ascension est de courte durée, car c’est au premier niveau qu’il doit s’arrêter. Cabinet du ministre de la magie, s’il vous plaît. Il quitte donc la cage de ferraille bringuebalante et s’engage dans un long couloir au lambris sombre et à la moquette d’un rouge éclatant. Comme il s’y attendait, le premier niveau est très animé et il croise sur son chemin de nombreux employés. Certains sont en grande discussion tandis que d'autres se déplacent à la vitesse de l’éclair avec une pile de papiers qui leur obstruent la vue. Peter passe inaperçu. Jusqu’à ce qu’il arrive aux portes d’une grande salle où de nombreuses tables sont alignées. Cela lui rappelle les quelques examens qu’il a pu passer à Poudlard, ce qui a le don de le faire grimacer. Au-dessus de sa tête, de nombreuses notes de service volent dans un balai incessant. Le blond avise la pièce un instant, puis il repère rapidement l’objet de sa visite. Il s’apprête donc à s’engager dans la pièce lorsqu’il est stoppé dans son élan par une voix nasillarde.

— Puis-je vous aider monsieur ? Lui demande un jeune homme élancé, tout en remontant ses lunettes en écailles sur son nez.
— Je viens voir Miss Demelza Rowle.
— Vous aviez pris rendez-vous ?
— Non, mais je…
— Alors je crains que cela ne soit pas possible. Prenez rendez-vous et revenez un autre jour, réplique le secrétaire avec dédain, en tournant les talons.

En quelques secondes, Peter voit son plan tomber à l’eau. Mais étant un Gryffondor, doublé d’un Gray particulièrement obstiné, il est loin d’avoir dit son dernier mot.

Alors, il tente le tout pour le tout.

— Je trouve inadmissible d’être ainsi traité de la sorte, répond-il faussement indigné, en haussant le ton, attirant alors les regards de quelques employés curieux.

Le secrétaire se tourne de nouveau vers lui, une expression inquiète venant froisser ses traits anguleux. Il commence d’ailleurs à ouvrir la bouche, mais Peter l’interromps avec toute la condescendance que son personnage peut posséder.

— Savez-vous qui je suis ? Je suis le fils de Beresford Rowle. Oui, monsieur, vous avez bien entendu, Beresford Rowle ! Et je n’ai pas besoin de rendez-vous pour venir voir ma cousine.

Face à lui, l’assistant perd subitement le peu de couleur qui teinte son épiderme avant de s’empourprer. Il bégaye des excuses incompréhensibles, puis invite le “soit disant” héritier Rowle à le suivre. Satisfait, Peter le suit à travers les méandres du bureau, jusqu’à une jolie porte d’ébène où un écriteau indique “Demelza Rowle”, en lettres dorées. Il repère également, quelques portes plus loin, un autre nom qui lui est familier avant qu’il ne reporte son attention sur le secrétaire de la jeune femme. Ce dernier toque rapidement contre le panneau de bois, qu’il entrouvre suffisamment pour y passer la tête. Peter comprend à moitié ce qu’il baragouine tellement son débit de parole est précipité, puis il disparaît à la vitesse de l’éclair de l’autre côté de la pièce, laissant le blond seul devant la porte. Un sourire goguenard étire ses lèvres, le souvenir de sa première rencontre avec Demelza remontant dans sa mémoire. Ses employés avaient toujours une fâcheuse tendance à ne pas rester trop longtemps en sa présence. Elle n’était pourtant pas si terrible que ça.
Il faut dire que Peter n’a peur de rien. Surtout pas d’une jolie blonde à la voix glacée. Alors, il rentre sans se faire prier.

— Je n’ai pas beaucoup de temps… Annonce la voix sèche de la jeune femme avant de s’interrompre subitement lorsqu’elle lève la tête et qu’elle remarque que c’est Peter qui se tient devant elle.

Lorsqu’ils se posent sur lui, ses yeux verts se teintent d’une surprise passagère. Néanmoins, le sentiment s'évanouit si rapidement que Peter croit l’avoir rêvé, car désormais, elle le jauge de son fameux air impassible, digne d’une reine des glaces.

— Je t’ai manqué ? Lui demande-t-il, un air foutrement malin collé sur le visage.

Il se doute de la réponse, l’impertinent. Mais le temps a passé, un peu plus d’un an s’il ne se trompe pas, alors la question peut bien se poser, pas vrai ? C’est qu’ils font partie de deux sphères qui ne sont pas amenées à se croiser, car elles sont beaucoup trop éloignées. À des années-lumière l’une de l’autre. Pourtant, au fil des mois qui ont passé, Peter n’a pas complètement oublié Demelza. Sa silhouette élégante lui est apparue au détour de quelques coupures de la Gazette du Sorcier, où elle était légèrement en retrait derrière Wilhelmina Tuft. Il l’a même croisé, sans qu’elle le voit, du moins, c’est ce qu’il croit, lors d’un meeting de la première ministre (tout à fait barbant si vous voulez son avis), alors qu’il devait surveiller le bras-droit de cette dernière, Bartholomew Ferguson. Pendant ce qui devait être un laps de temps infime, les deux anciens élèves de Poudlard ont été plus proches que jamais. À peine quelques mètres pour quelques secondes. Instant fugace, perdu au milieu de la masse. Ils n’avaient rien à faire ensemble après tout. Leurs différences étant un fossé beaucoup trop large à combler. Seulement, aujourd’hui, Peter a besoin que la jeune femme lui rende un service. Faut dire qu'il a toujours aimé se compliquer la vie.

— Est-ce que c’était nécessaire de te faire passer pour mon cousin ? Tu es bien loin d’avoir le standing d’un Rowle, répond-elle avec un profond dédain, en posant la plume avec laquelle elle était en train d’écrire.

D’un mouvement gracieux, elle agite sa baguette et verrouille la porte dans le dos de Peter. Ce dernier se rapproche de son bureau, pas le moins du monde embarrassé par la pique tout juste proférée. Sans y avoir été invité, il s’installe dans l’un des fauteuils qui fait face au bureau de l’assistante personnelle de la première ministre. Ses yeux curieux parcourent rapidement la pièce, impressionnés par le luxe et l'agencement impeccable de chaque objet. Visiblement, tout est accordé au millimètre près, à l’image de la propriétaire des lieux.

— Tu as deux minutes pour me dire ce que tu fais ici, avant que je n’appelle la sécurité. J’ai autre chose à faire, de beaucoup plus intéressant, que de bavarder avec toi, Gray, réplique-t-elle avec acidité, sans pour autant hausser le ton.

Comme un doux poison.

— Tu auras beau dire tout ce que tu veux, milady, mais je ne peux pas croire que ton tas de paperasses est plus intéressant que ma personne, réplique-t-il en s’emparant d’un dossier sur le bureau, dans l’optique de le feuilleter.

Seulement, il n’a pas le loisir d’en décrypter les lignes puisqu’une tape invisible l’oblige à replier ses doigts et à lâcher la chemise qui retourne se poser tranquillement à sa place. La mine faussement offusquée de Peter, croise alors le regard imperturbable, quoique un peu satisfait, de Demelza qui repose sa baguette sur le bois d’ébène.  

— Comme je te le disais, j’ai autre chose à faire. Donc dépêche-toi de déguerpir d’ici.  
— Très bien, très bien, qu’il réplique en levant les mains en signe de reddition.  

Il soupire, en exagérant à peine. Vous connaissez Peter, après tout. Ses yeux clairs, braqués sur la silhouette de la sorcière, il reprend une contenance un peu plus sérieuse.

— J’ai besoin d’un service.
— Tu plaisantes, j’espère ?

L’étonnement est passager. Il est de si courte durée, que seul un observateur avisé aurait pu le remarquer. Chez Demelza Rowle, les nuances de ses expressions s’apparentent parfois à des mirages, des illusions qui dansent furtivement sur les traits de son visage. Si bien que, sa surprise se mue bien vite en une ironie tranchante.  

— J’ai l’air de plaisanter ?
— Qu’est-ce qui te fait dire que je suis prête à t’aider ?
— Ma langue.
— Comment ça ta langue ? Va droit au but, Gray.
— Oh, il ne faut pas me le dire deux fois, répond-il avec un sourire malin.

Demelza le fusille instantanément du regard, lorsqu’elle saisit que l’esprit de Peter est définitivement mal placé. Certains le qualifieraient de lourdingue, mais le Gryffondor se voit plutôt comme un génie de la blague. D’ailleurs, il ricane, satisfait d’avoir su saisir la perche qui lui était tendue, dans l’unique but de titiller les nerfs de la sorcière. Enfin, peut-être ne devrait-il pas trop l’asticoter, car c’est son aide qu’il est venu quémander.

— Ok, ok, j’arrête, ajoute-t-il précipitamment en voyant la jeune femme s’emparer à nouveau de sa baguette.
— Tes deux minutes sont quasiment écoulées, énonce-t-elle froidement, peu amusée par son attitude.

Peter prend une légère inspiration, ses doigts tapotant dans un rythme irréguliers les accoudoirs de son fauteuil.

— J’ai vu que Ferguson avait son bureau non loin du tien.
— Oui, et ?
— Tu sais très bien qu’il trempe dans des affaires louches, tout comme ta chère patronne.
— Par Morgane, où est-ce que tu veux en venir ? Souffle Demelza, probablement las de devoir l’écouter.
— Tu te souviens d’Olav ? Cet enfoiré s’est suicidé avec une capsule de cyanure avant d’avoir pu être interrogé, énonce tranquillement Peter. Il a préféré mourir, plutôt que de dénoncer les activités de Ferguson et Tuft. J’imagine que ce genre de rumeur ne serait pas très bon pour vos affaires.

Là, il a capté son intérêt. Il le voit à la posture de ses épaules qui se redressent légèrement, au plissement de ses paupières qui transforme momentanément ses iris en deux fentes assassines. Dangereusement vipérines.

— Est-ce que tu essaies de me faire du chantage ?

La froideur de son ton en aurait fait reculer plus d’un, mais le feu de Peter est bien trop ardent pour se laisser arrêter par le givre qui enrobe ses syllabes.

— À toi de voir. Je tiens ma langue contre un petit service.
— Tu sais très bien que ma parole a plus de poids que la tienne. On ne te croirait pas.

Elle dit vrai et il le sait. Sa position, tout comme son nom fait qu’elle aura toujours plus d’importance que Peter n’en aura jamais. Ça le fait terriblement chier de devoir l’admettre, alors il ne lui fait pas ce plaisir. Il rit donc, pour masquer le fait qu’il vient de perdre un point en faveur de la jeune femme, mais il n’a pas dit son dernier mot. Parce qu’il ne peut pas demander sa faveur à quelqu’un qui lui est proche, au risque que l’on s’inquiète pour lui. Les Sceptiques auraient sans doute pu l’aider, mais il leur a menti dès le départ et il ne veut pas être mis sur la touche. Peut-être aurait-il pu trouver ce qu’il cherche dans l’allée des Embrumes, mais il n’aurait jamais eu assez d’argent pour se le payer. Alors, oui, il avait pensé au ministère de la magie et à Demelza. Parce que, ce dont il a besoin, s’y trouve. Convaincre la sorcière était la nébuleuse de son plan, mais le Gryffondor est quelqu’un de particulièrement tenace.

— Écoute, il faut juste que je descende au département des mystères. Après ça, tu n’entendras plus jamais parler de moi, ni de…

Il s’arrête au milieu de sa phrase, le souffle soudainement coupé. Ses paupières se ferment, jouant un spectacle macabre et douloureux qui le poursuit désormais depuis plusieurs mois. Il y a du sang, des larmes, des proches qui meurent dans d’atroces souffrances. Cela ne dure que quelques secondes, mais quand il rouvre ses yeux, il remarque que ses mains se sont crispées sur les accoudoirs de son fauteuil, à en blanchir ses jointures. Face à lui, la mine de Demelza se fait interrogatrice, quoiqu’un peu suspicieuse. Il parade avec un rictus dont il a le secret, pour masquer la douleur qui a paralysé passagèrement ses muscles. L’air de rien, comme toujours.

— J’ai besoin d’un retourneur de temps, finit-il par annoncer de but en blanc.

Je n’ai pas encore le pouvoir d’effacer le passé.
Personne n’a ce pouvoir, c’est vrai. Il suffit seulement de se l’octroyer.